Mon cher cousin,
L’urgence des évènements me conduit à t’écrire plus tôt que prévu.
Dans la lettre précédente je t’écrivais : « Dans un prochain courrier je te dirai, à l’instar de le belle Solange, quel pape je souhaiterais. »
Et en préambule, pour qu’on ne fasse pas une erreur de lecture avec les mauvaises clefs, cette précision d’importance : je n’ai pas écrit ces mots parce que les derniers papes n’auraient pas été à la hauteur.
Les médias ont pour principal défaut une certaine « perversité intellectuelle » : non seulement ils se moquent complètement de ce que dit ou de ce que pense vraiment le pape, quel qu’il soit, ils tronquent pour mieux l’attaquer les moindres de ses paroles, mais en plus ils revendiquent toute liberté de mentir, sans accorder le droit de réponse, parce qu’ils orientent le monde contemporain dont ils se veulent l’interprète obligé, dans une optique qui ne veut pas accepter la Vérité qu’exprime le vicaire du Christ.
Je te remets en mémoire ce paragraphe qui est une séduisante litanie tirée de l’article signé Solange Bied-Charreton dans Le Monde du 02/03/2013[1].
« Je veux un pape ringard : un pape insupportable, irrécupérable, trop ringard, qui fait honte. Un pape-autorité, pour pouvoir le combattre. Un pape du Moyen Age, voire un pape archaïque. Un pape que je puisse facilement traiter de fasciste quand il dépasse les bornes.
Un pape toutes options, muni de fâcheux dérapages dans le domaine des mœurs, un pape d’erreurs de communication révélant sa vraie nature de pape. Un repoussoir de rêves. Un empêcheur de changer le monde. Et vieux, s’il vous plaît, le plus vieux possible. Un pape qui comprend rien aux jeunes, au monde moderne qui évolue. Un pape « old school », qui tient la porte aux dames, envoie des bouquets de fleurs…
Je veux un pape contre qui se révolter. Je réclame un pape contre qui faire des manifs. Je veux pouvoir casser du pape. Comment j’existerais si je ne puis contester le monde ancien, m’affirmer sans avoir à détruire des siècles et des siècles d’histoire ? Alors j’aimerais autant que l’ennemi soit identifiable, merci d’avance. »
Alors si tu me permets, et en plagiant la forme, je vais te dire comment je me positionne sur le même sujet.
D’abord, pour que les choses soient bien claires et compréhensibles, je ne peux pas faire abstraction d’un contexte : l’auteur a en travers de la gorge un héritage lourd à assumer dont elle ne manque de faire la douloureuse confession en déplorant à demi-mot faire partie « de la génération Mitterrand, de ceux qui recréent leurs contraintes et s’enfoncent avec elles dans leurs contradictions. »
Elle se définit elle-même : « trentenaire urbaine, j’habite Paris depuis ma naissance. J’ai fait des études supérieures, voyagé aux Etats-Unis, appris à jouer de la guitare. Pris de la drogue, connu des hommes, visité des musées d’art moderne. J’ai su me confronter à des œuvres dérangeantes, d’inspiration tribale, de facture révolutionnaire. »
Cette génération à bout de souffle semble en panne d’inspiration et je ne vois pas encore de successeur en lice, si tant est qu’il soit souhaitable de lui en trouver un.
Dont acte.
Il y a aussi d’autres générations qui sont nées dans ce dernier quart du XX° siècle.
Elles ont choisi un autre modèle : tu as la Génération Jean Paul II, puis la Génération Benoît XVI, toutes les deux sont dans la continuité, sans césure quant aux motivations et aux nobles aspirations … en attendant que se lève la Génération ….
Tu me permettras de m’exprimer en son nom.
Nous voulons un pape…
- Un pape Fashion : pas au sens habituel du terme, question style vestimentaire, mais un pape qui tient sa place dans le paysage médiatique autrement que comme une icône de magazine people, parce qu’il a des choses vraies et vitales à nous dire sur la foi et sur la morale.
- Un pape qui sorte des clous de temps en temps : non par souci d’originalité et de ne pas faire comme tout le monde, mais parce qu’il est le représentant institué de celui au sujet duquel il avait été prédit à sa mère qu’il serait « un signe de contradiction ».
- Un pape hors-piste : non pas parce qu’il déraille ou qu’il dérape, mais parce qu’il a le devoir de ne pas suivre le consensus mou de l’évolution naturelle en pente descendante vertigineuse de la société en manque de repères.
- Un pape « Rallye-Dakar » : qui n’a pas peur de l’aventure, sans courir l’aventure pour l’épate, parce qu’il sait bien que sa fonction est de marcher en tête, en tenant bien en main la Croix qu’il reçoit en héritage de son maître, comme l’insigne de sa charge et obéissant au mandat de la porter pour le suivre.
- Un pape version tempête apaisée plutôt que radeau de la Méduse : parce qu’il est à la barre de la barque de Pierre et qu’il a pour mission d’aller au large, malgré les tempêtes.
- Un pape « Vendée-Globe » : qui ne craint pas d’affronter les 40° rugissants qui se déchaînent chaque fois qu’il prononce une parole qui va à contre-courant du tout-prêt-à-penser dans les domaines tellement sensibles de la foi et de la morale.
- Un pape qui siffle la fin de la récré : maintenant tout le monde rentre à la maison et plus question de réinventer et de faire des expériences pour voir si ça marche mieux sous prétexte que les méthodes d’avant c’est plus « fashionable ».
- Pas un pape « pot-de-fleurs-parce-que-c’est-décoratif » : un pape qu’on invite pour les grandes occasions parce que ça fait bien sur la photo dans les archives historiques[2].
- Pas un pape langue de bois : un pape qui parle haut et fort, qui nous fixe des exigences et des objectifs élevés à la mesure de la mission qui a été celle de l’Eglise de toujours, depuis le premier jour, avec les premiers chrétiens dont beaucoup furent des martyrs, et jusqu’à aujourd’hui.
- Pas un pape G.O. style Club-Med : qui fait « gouzi-gouzi » pour plaire à tout le monde et ne déplaire à personne.
- Pas un pape qu’on laisse jouer au pape : parce que c’est une figure incontournable et qu’on peut plus s’en passer même si on ne l’écoute plus.
- Pas un pape qu’on n’autorise pas à parler des droits de l’homme : parce que la meilleure façon de servir les droits de l’homme c’est d’affirmer et de respecter les droits de Dieu.
Nous voulons un pape qui marche devant nous, un pape qui prie, un pape qui nous ouvre le chemin, un pape qui n’a pas peur d’aller à rebours des modes qui passent, parce que c’est la mission que lui a confiée Jésus-Christ :
15 « Jésus dit à Simon-Pierre : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu plus que ceux-ci ? » Il lui répondit : « Oui, Seigneur, vous savez que je vous aime. » Jésus lui dit : « Pais mes agneaux. »
16 Il lui dit une seconde fois : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? » Pierre lui répondit : » Oui, Seigneur, vous savez bien que je vous aime. » Jésus lui dit : « Pais mes agneaux. »
17 Il lui dit pour la troisième fois : « M’aimes-tu ? » et il lui répondit : « Seigneur, vous connaissez toutes choses, vous savez bien que je vous aime. » Jésus lui dit : « Pais mes brebis. » 18 « En vérité, en vérité je te le dis, quand tu étais plus jeune, tu te ceignais toi-même, et tu allais où tu voulais ; mais quand tu seras vieux, tu étendras les mains, et un autre te ceindra, et te mènera où tu ne voudras pas. »
19 Il dit cela, indiquant par quelle mort Pierre devait glorifier Dieu. [3] »
2013.03.08
[2] A ce propos on se souviendra de l’assistance de nombreuses personnalités à la conférence de Benoît XVI aux Bernardins à l’occasion de sa visite pastorale en France du 12 au 15 septembre 2008 – http://www2.ktotv.com/cms/videos/fiche_video.html?idV=00040852&vl=video_nouveautes
[3] Jean, 21, 15-19
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