Une brève explication à titre d’introduction.
J’ai découvert par hasard en surfant sur la toile le site de Régis de Castelnau[1]. Sans bien connaître l’auteur du blog Vu du droit[2] je ne partage sans doute pas beaucoup de ses convictions personnelles mais c’est sans importance dans le contexte qui est le motif de cet article. Régis de Castelnau a le regard professionnel d’un juriste compétent et c’est la seule chose qui m’intéresse.
Mehus Woman taken in adultery 17th century Pen and ink, graphite on paper
Copyright: © Courtauld Institute of Art Gallery, London
Baupin… Barbarin … même combat ?
Puisque dans ces deux affaires l’auteur du blog, – juriste de formation et donc ayant toutes les compétences pour s’exprimer -, parle de « lynchage » le rapprochement des deux « affaires » est une commodité de langage.
Mais ne nous y trompons pas, là s’arrête la corrélation ! Ni le fond, ni les enjeux ne sont les mêmes.
Cependant et si je poursuis dans la ligne du rapprochement, je ne développerai que la plus récente des deux histoires, « l’affaire Baupin ». Il m’apparaît que dans les deux cas les médias et tous ceux qui montent au front, quels que soit leur affinité ou leur dissentiment à l’égard des personnes, n’ont peut-être pas pris la vraie mesure de la question. Je dis « question » en évitant soigneusement de créer une problématique.
Une question est simplement posée et attend une réponse. Un problème suppose déjà – dans l’acception médiatique courante du terme – une part de non-dit, de mystère caché… bref une embrouille dissimulée.
En l’occurrence ces affaires et je le dirai avec une certaine franchise « brut de décoffrage » : c’est une « affaire de sexe » avec tout ce que l’expression suppose de nauséabond. Je précise tout de suite ma pensée pour éviter au lecteur de s’égarer sur une fausse piste. Je n’aime pas parler de la sexualité en la réduisant à « une question de sexe ». Pour moi, médecin, le sexe est une question d’anatomie, sans plus.
La vraie question, et j’y reviens, est celle de la sexualité et du rapport personnel et sociétal à la sexualité. Or du côté des victimes -qui en tant que telles ont tous les droits de recourir aux procédures légales- comme du côté des commentateurs en tout genre, c’est surtout une affaire de sexisme et d’abus de pouvoir. Or je pense qu’on se trompe de cible. La réalité est, en tout cas, à l’origine de « l’affaire Baupin », principalement, qu’on me pardonne la sincérité frontale, « une histoire de mec incapable de maîtriser sa libido ».
Je n’ai pas la compétence pour aborder ces situations sous l’angle juridique et de toute façon le droit devra passer … Je veux encore croire que le droit et la justice marchent dans la même direction … mais peut-être suis-je naïf.
Ce qui m’afflige le plus c’est la convergence de tous les commentaires lus ou entendus sur l’affaire Baupin. Et nous n’en sommes qu’au début, non sans avoir la conviction que bientôt elle sera reléguée au second plan … Le scoop. … toujours le scoop ![3] Ainsi il s’agirait principalement d’une histoire de pouvoir masculin dans la sphère politique. Certes ce pouvoir se serait traduit par des propos et des gestes connotés d’un homme à l’égard de collègues femmes mais c’est (presque) anecdotique. Ce qui ressort majoritairement des commentaires c’est que le pouvoir exercé par les hommes est encore trop largement dominateur ceci expliquant cela. CQFD.
Au fait, est-ce l’apanage des hommes politiques ? Et puis quand il est question de « harcèlement sexuel » on ne parle que des hommes vis à vis des femmes. Je n’ai pas encore lu que le harcèlement soit le fait de femmes vis à vis des hommes. Par prudence et surtout pour éviter de sombrer je ne pousserai pas plus loin les recherches.
Mais quand donc cessera-t-on de lever des écrans de fumée pour dissimuler cette « réalité que je ne saurais voir »…
Quel écran de fumée ?
Celui de la « féministosphère » qui a trouvé là un terrain favorable à ses revendications habituelles. Il existe quand même une grande hypocrisie qui consiste à jeter la responsabilité exclusive sur le machisme en politique. Il faut prendre ses responsabilités et ne pas se défausser ! Que n’a-t’on entendu déjà en si peu de temps et bien évidemment de la part de femmes qui se revendiquent d’un féminisme de combat. Je veux dire ici un féminisme agressif qui considère la différence homme-femme comme un champ de bataille où s’affrontent des adversaires dont l’un doit nécessairement écraser l’autre. Que je précise pour éviter tout malentendu que je partage la conviction qu’il y a une place dans la société et dans tous les domaines pour les hommes et pour les femmes sans discrimination aucune, dans le respect de la spécificité et de la dignité propres de la personne. Rien de plus contraire à la dignité que de vouloir gommer ce qui fait l’originalité de la féminité et la masculinité. Ainsi ce qu’on a surtout entendu c’est la revendication d’une parité toujours insuffisante comme si cette parité était la solution à toutes les discriminations ou pseudo discriminations. « L’affaire Baupin » étant inscrite dans l’atmosphère politique c’est principalement le monde du pouvoir qui est ciblé. Ainsi l’ambition et le pouvoir sont-ils considérés comme la sphère privilégiée où séviraient les « aventuriers du sexe ». Il est vrai que par leur exposition publique, les personnalités politiques sont en devanture. … La réalité, depuis des temps immémoriaux il est vrai, nous en a donné la démonstration, cette triste réalité ne date pas d’hier. Il aurait existé, dans l’histoire-fiction, un « droit de cuissage » [4]! … Pourtant, et sans céder à la tentation d’une lecture psychanalytique de ces « faits divers », ne devrait-on pas s’essayer à une interprétation plus simple et plus sincère mais qui n’est pas dans l’air du temps. Les beaux esprits, … -j’interprète : les pharisiens d’aujourd’hui- ont jeté des pierres sans avoir la certitude que la cible est vraiment coupable. Il est aveuglant de constater que ceux qui s’érigent en donneurs de leçon ne veuillent rien savoir de la morale … qui est un concept ringard et rétrograde incompatible avec la modernité. « Bizarre »… Vous avez dit « Bizarre ». La diversion est bien orchestrée ! Et le refus criant, qui tourne à l’obsession, de regarder la réalité en face !
Les responsables : le machisme en politique, l’insuffisance de la parité, la griserie du pouvoir. Et on en profite pour exhumer d’autres affaires qui étaient oubliées dans des placards.
On parle un peu, aussi, du silence, cet assourdissant silence des victimes, auquel on trouve une justification : la pression exercée sur les elles par la crainte de perdre un poste, une fonction, et, il est vrai, l’honorabilité qui en prend un coup ! Mais pourquoi attendre : la première agression verbale, le premier geste inconvenant et déplacé devraient déclencher l’alarme sans attendre la fin du délai de prescription.
Je ne me fais aucune illusion quant à la réception de cet autre message : tant qu’il ne sera pas possible d’aborder dans la sincérité et autrement que comme un « problème » … -ce qui est largement entretenu par la théorie psychanalytique- la question de la sexualité, le résultat sera que personne ne saura la regarder sous l’angle de la normalité psychologique. La libido visqueuse des désaxés n’est ni de l’ordre de la génération spontanée, ni des actes manqués et pas davantage de la majorité des hommes. Si je dis que des valeurs comme la pudeur, la discrétion, la simplicité, la chasteté dans les attitudes et dans le vêtement sont les meilleurs atouts pour se protéger, j’entends déjà les ricanements, les allusions douteuses, je vois la moue sceptique …
… Et le « spectre DSK » de resurgir mais ce n’est pas le Commandeur, ce serait plutôt Leporello.
A ce propos on ne les a pas tellement entendues à cette occasion ! Il est vrai que « ça ne lui ressemble pas [5]». « Il n’y a pas mort d’homme. [6]» Et puis, nous sommes aux Etats Unis, la victime est une femme de service…
Même si personne ne prononce le mot que tout le monde pense mais que personne n’ose dire : on est bien dans le domaine du pathologique ! Ce qui n’exempte pas de responsabilité.
Sempé a fait, il y a longtemps, un dessin très emblématique. Ne l’ayant pas retrouvé je le décris. Un homme est sur un chemin. Il avance tête basse, on le sent préoccupé. On suppose qu’il marche sur ce chemin qui conduit vers un embranchement où il bifurque dans deux directions : une qui conduit vers une maison où une plaque indique un nom « Psychiatre », devant laquelle attend le praticien. L’autre direction conduit à une église sur le parvis de laquelle attend un prêtre. Et la légende : une bulle au dessus du psychiatre qui s’adresse au prêtre : « S’il a le sens du péché il est pour vous, sinon, il est pour moi ! ».
La modernité dont on nous rebat les oreilles veut que tout soit dit, tout soit étalé au grand jour, sans limite… Sinon c’est de la censure ! Oh le vilain mot ! Pas question de brider la créativité dans les arts, en littérature, au théâtre, au cinéma, dans les arts plastiques… etc. Surtout ne pas interdire : « Interdit d’interdire ! ». On était en 1968.
Pour une personne normale la sexualité reste du domaine de la vie privée… en principe ! Qui me fera croire que l’érotisme[7] –je ne dis même pas la pornographie mais la « description et exaltation par la littérature, l’art, le cinéma, etc., de l’amour sensuel, de la sexualité »– est un ressort naturel et normal pour la personne humaine ? Quand une personne éprouve comme une nécessité de voir, de lire, d’entendre … des messages érotiques, j’éprouve les plus grands doutes sur sa normalité. En ce moment se déroule le Festival de Cannes. Récemment, Antoine Guillot, un critique cinématographique commentait deux films présentés le premier jour de la compétition. A propos d’un de ces films il disait, sans s’émouvoir et comme si cela allait de soi qu’il y avait des scènes d’un « érotisme frontal ». Je ne sais pas vraiment ce qu’il entend par cette expression mais il ne faut trop d’imagination pour comprendre de quoi il s’agit. Normal, c’est du cinéma ! C’est le spectacle vivant ! « Touche pas au 7° art ! »
J’en termine par un retour sur le titre pour mettre en parallèle ce qui les rapproche vraiment mais seulement : les délits dont sont coupables les vrais responsables sont des délits sexuels.
La prétendue libéralisation des mœurs ou permissivité a ouvert la porte à toutes les dérives et exposé les personnes fragiles à toutes les agressions. Personnes fragiles : les jeunes dont la construction psychique et morale est en formation, les personnes dont la construction psychique et morale a été blessée, les adultes dont la construction psychique et morale a été détruite. Ces personnes fragiles sont plus que d’autres sensibles aux messages qu’envoient les vecteurs incontrôlés et incontrôlables qui surfent sur la vague de la sensualité la plus agressive portée par l’idéologie libertaire.
Ce qui n’est pas normal ce n’est pas tant d’avoir occasionnellement des pensées troubles voire déviantes dans le domaine sexuel, si elles ne sont pas suivies d’actes délictueux cela n’affecte pas d’autre personne et ceux qui en sont affectés de manière récurrente sont tenus d’assumer leur déviance personnellement et, si elles ont une conscience en activité, chercher à se corriger. Ce qui est autrement grave, c’est d’entretenir la déviance par des incitations diverses : lectures, films, sites… etc. de type érotique ou pornographique. Et c’est justement la cible que visent les vecteurs dont je parle plus haut.
Mais nous entrons là dans un vaste débat dans lequel n’osent pas entrer ceux qui pourraient assainir ce climat délétère. Ceux qui se risquent à le faire sont taxés de puritanisme vieux jeu.
… Tant que n’existera pas le courage politique et institutionnel de juguler les réseaux pornographiques mais aussi ceux qui véhiculent la sensualité comme norme sous prétexte de liberté d’expression, le jeu est commode aujourd’hui de tirer à boulet rouge sur quelques cibles qui se sont fait prendre au piège : les acteurs passifs ne sont pas exempts d’une grave responsabilité parce qu’eux mêmes ont contribué à ce qu’ils se mettent en ligne de mire.
Pizzicatho
2016.05.14
[1] http://www.vududroit.com/a-propos-de-lauteur/ & https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9gis_de_Castelnau
[3] A l’heure où je mets une dernière main à ces lignes, on n’en parle déjà presque plus !
[4] http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/le-droit-de-cuissage-n-existait-127562
[5] http://archives-lepost.huffingtonpost.fr/article/2011/05/15/2495312_dsk-arrete-pour-agression-sexuelle-ca-ne-lui-ressemble-pas.html
[6] http://www.marianne.net/hervenathan/Affaire-DSK-Jack-Lang-un-peu-de-decence-_a105.html
[7] http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/%C3%A9rotisme/30826
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