6 août – Fête de la Transfiguration
6 août 1945 – Hiroshima
Nagasaki «Le 9 août 1945, à dix heures et demie du matin, le suprême conseil de guerre se réunit au Quartier Général Impérial pour savoir s’il fallait capituler ou non. Ce fut donc au moment même de cette décision pour la paix ou pour la continuation de la guerre qu’explosa la bombe atomique, à 11 heures 2 minutes, sur notre quartier d’Urakami. En un instant, 8000 chrétiens furent rappelés à Dieu, et notre cathédrale disparut dans les flammes. Le 15 août, l’Édit impérial mit fin aux combats, et une première lueur de paix recommença à briller sur le monde. Or ce jour-là, l’Église fêtait l’Assomption de la Vierge Marie, à laquelle était dédiée notre Cathédrale. Cette coïncidence n’était-elle pas due à l’œuvre délicate de la volonté de Dieu? Nous avons entendu dire que cette seconde bombe atomique, après Hiroshima, était destinée à une autre ville. Des nuages épais rendirent cette cible impossible, si bien que l’équipage américain changea de plan au dernier moment, et se dirigea vers sa cible secondaire : Nagasaki. L’objectif devait être le nord des fabriques de munitions, mais le vent fit dériver la bombe au-dessus de la Cathédrale. Ainsi nous savons que la Cathédrale n’a pas été visée par les pilotes américains. Mais c’est la Providence de Dieu qui choisit Urakami. N’y aurait-il pas un rapport mystérieux entre la cessation de la guerre et la destruction d’Urakami? Urakami ne serait-elle pas la victime choisie, l’holocauste offert sur l’autel du sacrifice en expiation pour tous les péchés de cette deuxième guerre mondiale? Pour notre humanité, héritière du péché d’Adam et du sang de Caïn, pour notre humanité qui s’est tournée vers les idoles en oubliant sa filiation divine, pour que finissent toutes ces horreurs, ces haines et que fleurissent à nouveau les bénédictions de paix, il ne suffisait pas du repentir, il fallait un sacrifice extraordinaire afin d’obtenir le pardon de Dieu. Bien que des villes entières aient été déjà rasées, cela ne suffisait pas. Mais quand Urakami fut détruit, Dieu agréa ce sacrifice, pardonna aux hommes et inspira à l’Empereur de mettre fin à la guerre. Notre Église d’Urakami a gardé sa foi intacte pendant 400 ans dans un Japon qui la proscrivait. Elle a enduré de nombreuses et longues persécutions. Et pendant toute cette guerre elle n’a cessé de prier pour que revienne la paix. Cette Église n’était-elle pas digne d’être choisie comme holocauste pour que des dizaines de millions d’hommes ne périssent plus victimes des ravages de la guerre? Ce 9 août, en voyant les flammes détruire la Cathédrale, nous savions que dans ce sublime holocauste montaient déjà les premières lueurs d’espoir d’un nouveau monde de paix. Huit mille catholiques, dont les prêtres de la cathédrale, ont été sacrifiés. Tous généreux et fidèles dans leur foi. Combien sont-ils heureux d’avoir quitté la vie, l’âme pure, sans connaître la défaite! Nous qui restons sur cette terre, notre sort est dur. Le pays est vaincu et notre ville détruite. Un désert de cendres et de décombres s’étend à perte de vue. Nous n’avons ni maison, ni vêtements, ni nourriture. Nos champs sont dévastés, et nous, les survivants, ne sommes plus qu’une poignée. Pourquoi ne sommes-nous pas morts ce jour-là? Pourquoi devons-nous continuer une existence de souffrance? Maintenant nous voyons l’énormité de nos fautes et nous comprenons que si nous restons aujourd’hui en vie, c’est que nous avons encore un long chemin à parcourir pour devenir à notre tour une offrande digne. Les réparations imposées par la déclaration de Potsdam sont un fardeau lourd de douleur et de souffrance. Pourtant cette charge débouche sur l’espoir de voir sous peu un monde nouveau et purifié. Bienheureux ceux qui pleurent car ils seront consolés. C’est fidèlement et jusqu’au bout que nous monterons ce chemin semé de douleurs. En le suivant, affamés, assoiffés, méprisés, fouettés, nous savons que nous sommes aidés par Celui qui jusqu’au sommet du Calvaire a porté sa Croix : Jésus-Christ. Le Seigneur a donné, le Seigneur a repris, que soit béni le nom du Seigneur. Soyons reconnaissants que Nagasaki ait été choisie pour ce sacrifice par lequel paix et liberté ont été rendues au monde. Que les âmes de tous nos défunts reposent en paix dans l’amour de Dieu. » — Paroles de Takashi Nagai lors de la messe de funérailles du 23 novembre 1945 in Une lumière dans Nagasaki, anthologie de textes de Takashi Nagai, Nouvelle Cité – http://www.dissident-media.org/infonucleaire/Nagasaki_nagai.html
Une lumière dans Nagasaki – Takashi Nagai – Extraits
Dans les cendres j’ai découvert au coin nord-est du terrain ce crucifix qui appartenait à l’autel familial. Évidemment la croix de bois avait disparu, anéantie par le feu, mais le Christ de bronze demeurait intact, sans une seule déformation. Relique précieuse du temps où le régime Tokugawa persécutait le christianisme. Tout m’a été enlevé. Ce Christ seul, je l’ai retrouvé.
Notre Église d’Urakami a gardé sa foi intacte pendant 400 ans dans un Japon qui la proscrivait. Elle a enduré de nombreuses et longues persécutions. Et pendant toute cette guerre elle n’a cessé de prier pour que revienne la paix. Cette Église n’était-elle pas digne d’être choisie comme holocauste pour que des dizaines de millions d’hommes ne périssent plus victimes des ravages de la guerre ?
Les hommes délibèrent et discutent maintes et maintes fois sur la paix du monde. Mais en vérité, on ne peut pas devenir artisan de paix en participant seulement à des réunions et faire des discours compliqués. Le rayonnement de la paix se trouve dans la force de l’amour vécu tout simplement.
A moins d’avoir souffert et pleuré, on ne comprend pas vraiment ce qu’est la compassion, on ne sait pas réconforter ceux qui souffrent. Si on n’a pas pleuré, on ne sait pas sécher les yeux des autres. Celui qui n’a jamais marché dans l’obscurité ne peut pas aider celui qui marche à tâtons pour trouver son chemin.
Celui qui n’est pas satisfait de sa vie, va chercher au loin le bonheur, mais bien souvent il revient en pleurant.
Mon bonheur, je le trouve ici même dans le travail que je fais, dans tout ce qui m’environne. Mon bonheur est simple. Je regarde la rose qui fleurit dans mon jardin. Elle est belle. Je lui ai donné de l’engrais, je lui ai enlevé les insectes nuisibles, je l’ai arrosée, je l’ai aidée à grandir, mais c’est Dieu qui l’a fait fleurir. Par ses propres forces l’homme ne peut pas faire éclore une fleur, c’est pourquoi il trouve que son bonheur est imparfait. Mais celui qui accepte ses limites en collaborant à la puissance du Dieu Créateur, entre dans la perfection de l’acte créateur. Il ne va pas chercher un bonheur lointain parce qu’il est là tout près de lui, chaque jour à la porte de sa vie.
Pour connaître Takashi Nagai :
Le sourire des cloches de Nagasaki, Makoto Nagai, Nouvelle Cité, 2004, (ISBN 2-85313-464-4).
Une lumière dans Nagasaki, anthologie de textes de Takashi Nagai, Nouvelle Cité, 2006, (ISBN 2-85313-502-0).
Prier 15 jours avec le docteur Nagai, Marie-Renée Noir, Nouvelle Cité, 2008, (ISBN 978-2-85313-540-5).
Requiem pour Nagasaki, Paul Glynn, Nouvelle Cité, 1994, (ISBN 2-85313-267-6).
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